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Revue de presse |
31 décembre 2020 |
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L'Actualité, la Une - 2021/01/01 |
Valérie Borde, Marie Boule, Alec Castonguay, Jean-Benoît Nadeau, Marie-Hélène Proulx et Claudine St-Germain Dans une année à nulle autre pareille, leur force, leur courage et leur dévouement nous ont aidés à garder espoir. Voici les personnalités de l’année 2020, choisies par l’équipe de L’actualité. les Préposées aux bénéficiaires Au coeur de la tempête Patricia Hotte aime répéter qu’elle a été «achetée»en même temps que la bâtisse du CHSLD Vigi Pierrefonds, dans l’ouest de l’île de Montréal. «Ça fait 35 ans que je suis là, je venais en prime avec les meubles», badine la préposée aux bénéficiaires. À un an de la retraite, cette grande châtaine à la voix éraillée constate, non sans dépit, qu’il aura fallu une pandémie pour que son métier obtienne de la reconnaissance. «Pour la population, on était surtout des “ramasseux” de m…, on faisait une job qui n’intéressait personne.»À tel point qu’elle a longtemps été gênée de dire ce qu’elle faisait dans la vie. «Mais cette année, on est passés de zéros à héros !»L’aide-soignante est sur la ligne de front depuis le mois de mars, à se battre contre un virus qui allait avoir tué 5 545 aînés en centres d’hébergement en date du 22 novembre — soit plus de 80 % des victimes de la COVID-19 au Québec. Une hécatombe à laquelle elle a assisté dans un état de tension innommable, à l’instar des dizaines de milliers de préposées aux bénéficiaires (majoritairement des femmes) qui prennent soin des personnes âgées dans divers milieux:elles sont 25 300 dans les CHSLD relevant de l’État et 21 000 dans les résidences privées pour aînés, en plus de celles en CHSLD privés et en ressources intermédiaires, dont le nombre n’a pu être confirmé par L’actualité. «Au printemps, il y a des jours où j’avais assez d’une main pour compter les employés. On courait comme des fous pour essayer de garder tout le monde en vie.»Si le coronavirus n’a pas voulu d’elle, comme elle le dit en blaguant, il a envoyé au tapis presque tous ses collègues. Et a emporté 18 des 64 résidants de Vigi Pierrefonds. «Certains sont morts dans nos bras, sans leur famille. Quand je rentrais à la maison, je braillais d’épuisement. Je ne m’en suis pas encore remise.»Comme elle, le député libéral Enrico Ciccone a été marqué par son expérience, lors des deux semaines qu’il a passées en avril au CHSLD Nazaire-Piché, à Montréal. Il était venu porter secours au personnel, qui se battait contre la COVID avec l’énergie du désespoir. En évoquant le courage des «PAB», leur surnom dans le métier, sa voix se brise. Secoué, il interrompt la conversation. «Ces filles-là sont surhumaines, reprend-il. Il faut tellement de sensibilité, de tendresse pour faire ce travail.»Certaines y ont laissé leur peau. Sur les 13 professionnels de la santé décédés depuis mars, au moins 8 étaient des PAB. Pendant la première vague, c’est le personnel de la santé qui était le plus à risque d’être contaminé, selon une enquête de l’Institut national de santé publique du Québec menée auprès de 5 000 soignants ayant contracté le virus. Plus du tiers d’entre eux était des PAB. Un sombre bilan qui n’étonne personne. «C’est nous qui sommes le plus près des patients, on passe beaucoup de temps avec eux», explique Jolive Antoine, préposée aux soins au CHSLD Laurendeau, dans le nord de Montréal. «Comme la plupart sont en lourde perte d’autonomie, nous sommes leurs yeux, leurs bras, leurs jambes.»En avril, elle a été terrassée par la COVID-19, au point de ne plus pouvoir marcher. Mais deux semaines plus tard, elle était à nouveau au poste. «Quand on est soldat, on va à la guerre.» Josephine Manuel aussi a attrapé le virus à la fin mars, lors de l’éclosion catastrophique au CHSLD Herron, à Dorval, où elle est aide-soignante depuis huit ans. L’établissement privé, qui a fait l’objet d’une enquête du coroner à la suite de la mort de 49 résidants, fermera ses portes en 2021. La PAB est encore heurtée par des accusations parues dans les médias, disant que les membres du personnel avaient abandonné les aînés à leur sort. «Rien n’est plus faux. Nous sommes tombés malades, notamment parce que nous n’avions pas assez d’équipements de protection.» Au début de la crise, masques, visières et jaquettes de protection étaient distribués avec parcimonie afin de ménager les maigres réserves, témoigne Carolyne Hardy, PAB dans un CHSLD de Pointeaux-Trembles, où 9 des 75 résidants ont été contaminés. Ses collègues et elle arrivaient au boulot la peur au ventre. «Comme je souffre d’asthme, j’ai parfois pleuré devant ma fille parce que je craignais de mourir. Je voulais qu’elle sache à quel point je l’aime si ça m’arrivait.» Le manque de personnel, criant bien avant la pandémie, a exacerbé la détresse de celles qui se rendaient au travail. Au pire de la crise, des PAB se sont retrouvées seules au chevet de plusieurs dizaines de patients, contraintes de ne leur donner que quelques bouchées de nourriture et de les nettoyer en vitesse. Dans certains centres, on ne sortait les résidants de leur lit qu’un jour sur deux. «La pandémie a frappé un secteur déjà extrêmement fragile», soutient Angelo Soares, professeur au Département d’organisation et ressources humaines de l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal et auteur de plusieurs études sur les PAB. «Une soupe très amère mijotait depuis des décennies, et c’est ce qui a mené au désastre de la première vague.» Dans les années 1990, des coupes dans la maind’oeuvre et le minutage maniaque des tâches — selon la fameuse «gestion lean»— ont engendré une cadence de travail si accablante que, depuis, 65 % des nouvelles PAB capitulent au bout de cinq ans. «La population n’a pas idée des efforts qu’elles déploient pour s’occuper des aînés, tout en se battant contre une machine qui les coule», affirme le professeur. Dans le réseau de la santé, c’est le métier pour lequel on dénombre le plus de lésions professionnelles. D’abord, parce que les aidessoignantes reçoivent souvent des coups des résidants. Gerda Jerome, qui travaille au CHSLD ErnestRouthier, à Montréal, a reçu son quota de claques. C’est sans compter les crachats, le harcèlement sexuel, les insultes… et le racisme, véritable fléau dans les CHSLD de Montréal où les PAB noires sont majoritaires. «Des patients ne veulent pas qu’on s’occupe d’eux, on se fait traiter de n...», confie la préposée aux bénéficiaires d’origine haïtienne. Les PAB sont aussi usées par le marathon des soins, exécutés à la hâte en raison du nombre élevé de patients par aide-soignante, constate François Aubry, spécialiste de l’organisation du travail en CHSLD et professeur à l’Université du Québec en Outaouais. «Avant la pandémie, le taux d’absentéisme était de 15 %, ce qui est très élevé.» Mais la situation sur le terrain s’améliore, observent les PAB interviewées, grâce aux 6 700 recrues qui viennent d’être embauchées dans les CHSLD publics à la suite d’une formation accélérée mise en place en juin par le gouvernement. En comptant les 1 200 aides-soignantes encore aux études qui s’ajouteront bientôt à leur nombre, il manque encore 2 000 paires de bras pour atteindre l’objectif de 10 000 PAB que s’était fixé Québec. «Mieux vaut tard que jamais, mais c’est plate qu’il ait fallu que des gens meurent pour qu’on nous écoute enfin», dit avec regret Caroline Poulin, préposée aux soins au CHSLD de Loretteville, à Québec. «Ça fait longtemps qu’on dit qu’on manque de relève et qu’on veut un meilleur salaire.»La question de la rémunération piétine encore. En juin, le gouvernement Legault a proposé une hausse permanente du taux horaire des PAB, qui passerait de 22,35 $à 26,89 $au sommet de l’échelle salariale, mais les négociations avec les syndicats tardent à aboutir. Certaines ont droit à des primes, lorsqu’elles travaillent en zone chaude par exemple, sauf qu’il ne s’agit que d’une mesure temporaire liée à la pandémie. Et pour les PAB du secteur privé, outre une «prime COVID»de 4 dollars l’heure subventionnée par l’État, rien n’a été fait pour augmenter à long terme les salaires, d’à peine 14 à 16 dollars l’heure. Être si peu payée pour un job pareil est scandaleux, selon Alain Croteau, président du Syndicat des travailleuses et travailleurs du CIUSSS Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal — CSN. «On les appelle nos anges gardiens, mais maudit, elles sont exploitées ! dénonce-t-il avec émotion. Parce qu’elles sont des femmes, mais aussi parce qu’elles sont des Noires.»Les conditions de travail se sont tellement dégradées que les Blancs boudent maintenant ces postes, du moins à Montréal. «Ce sont des personnes racisées, aux prises avec des taux de chômage élevés, qui héritent de ce métier dont personne ne veut», fait-il remarquer. La paye des PAB ne rend pas justice à la difficulté de leurs tâches, estime aussi Isabelle Feillou, une professeure d’ergonomie à l’Université Laval qui étudie le travail du care (des soins) en CHSLD. «Elles sont sous-valorisées en partie parce que prendre soin des autres fait appel à des qualités réputées “naturelles” chez les femmes, comme l’écoute et la patience, plutôt qu’à des savoirs formels acquis à l’école ou au travail», explique-t-elle. De plus, ces aides-soignantes sont associées à une sorte de dégoût — la déchéance du corps, la démence, la mort — qui contribue à les garder dans l’ombre. «On ne veut pas voir ce qui se passe dans ces milieux, pourvu que ça roule ! C’est ce déni que la pandémie a fait exploser.» Patrick Couture Marquis a eu le coup de foudre pour ce métier alors qu’il étudiait en soins infirmiers, il y a 17 ans. Il a bien essayé de faire autre chose, histoire de vivre plus grassement, mais après une pause de trois ans, il a renfilé son uniforme. «Je m’ennuyais trop des personnes âgées. Je me sens utile auprès d’elles.»Le préposé aux bénéficiaires de 34 ans, qui travaille aujourd’hui au CHSLD de Loretteville, espère que la crise permettra à la population de comprendre l’importance du rôle des PAB. «Être encadrés par un ordre professionnel, comme les infirmières, nous aiderait à obtenir la reconnaissance et le poids politique dont elles jouissent, mais dans le système, c’est comme si on jugeait qu’on n’en vaut pas la peine.»Pourtant, les PAB doivent maîtriser de plus en plus de compétences, les aînés étant moins autonomes et en santé qu’il y a 20 ans. Entre autres, leur jugement clinique et leur sens de l’observation sont plus sollicités qu’autrefois, afin de déceler la moindre variation dans l’état de santé des patients. Les aides-soignantes veillent aussi au bien-être affectif des aînés, dont bon nombre ne reçoivent pas beaucoup, voire jamais, de visites. «On les fait rire, on les console, on apaise leurs angoisses», énumère Caroline Poulin, qui travaille aussi au CHSLD de Loretteville. «En somme, on s’organise pour qu’ils se sentent importants. Quitte à rester plus tard pour finir nos tâches.»Les PAB se fendent en quatre pour adoucir les jours des résidants, assure Chantal Morin, du CHSLD Pierre-Joseph-Triest, dans l’est de Montréal. Elle évoque un déjeuner organisé il y a trois ans par son équipe pour faire plaisir à des aînés qui rêvaient d’oeufs au plat avec le jaune coulant. «Tout le département était arrivé à 6 h avec des plaques de cuisson, du pain de ménage, du bacon... Un monsieur en pleurait de joie.»Et puis, il y a cette collègue qui teint les cheveux d’une dame sans famille, à ses frais; cette autre qui achète des produits pour faire des bains de pieds… Un dévouement discret, dit-elle, qui ne fera jamais les manchettes. «C’est comme mes poussins, je sais que je les ai avec moi jusqu’à leur mort», soutient Marie-Josée Frappier, une ex-pâtissière reconvertie en préposée aux soins au CHSLD Cloutier-du Rivage, à Trois-Rivières. Tous les dimanches, avant la COVID, elle distribuait ses fameuses «boules à Marie», des pop cakes maison. Bon nombre de ses protégés ne sont plus là maintenant, emportés par le virus. «Une journée, j’en ai perdu sept.»Une résidante l’a attendue toute une fin de semaine avant de mourir; elle voulait «sa»Marie-Jo. «Mes collègues m’avaient prévenue, je suis allée la voir. Je lui ai pris la main, et elle m’a donné son dernier souffle. Je porte le même prénom que sa fille.» «On a été témoins de scènes qui resteront en nous pour toujours», raconte Guylène Gabriel, qui travaille au CHSLD Paul-Gouin, à Montréal. «Quelle souffrance de voir s’éteindre tant de personnes loin de leur famille, sans que le dernier mot ait été dit.»Malgré le danger d’être contaminées, ses collègues et elle ont pris le soin de faire la toilette des mourants avant de poser un linceul sur leur corps. «Notre attachement était plus fort que la peur.» Son équipe s’est démenée pour éviter que la pandémie ne crée une «épidémie de tristesse»auprès des aînés. Les aides-soignantes leur présentaient leurs films préférés, faisaient jouer de la musique, dansaient et chantaient dans les couloirs. «Ça a permis d’atténuer le chagrin, dit-elle. Et ça nous a vraiment soudées.» Quand le virus aura levé le camp, Marie-Josée Frappier promet de se faire tatouer au poignet une envolée d’oiseaux, oeuvre d’une collègue infirmière. En hommage à ses «poussins»qui sont morts, mais aussi pour se rappeler à quel point la crise l’a fait grandir. «J’ai découvert en moi une force que je sous-estimais. Je n’ai pas eu un parcours facile, j’ai reçu de l’aide sociale... Ça me rend un peu émotive de le dire:mes filles m’ont vue braver l’ennemi pour apporter du réconfort à des gens, et elles sont fières de leur mère.»(Marie-Hélène Proulx) François Legault Passer à l'histoire «Comment va ton Rt, François ?»demande au téléphone le président de la France au premier ministre du Québec. Difficile de trouver un meilleur exemple du chemin parcouru depuis un an par les politiciens de la planète que cette question sur le taux de reproduction du virus SRAS-CoV-2 glissée dans la conversation, le 3 novembre dernier, entre Emmanuel Macron et François Legault. «Qui aurait pensé avoir ce type de conversation il y a un an ? demande François Legault. Et qui aurait dit que tous les deux, on saurait de quoi il est question du premier coup ?»Le taux de reproduction, les vecteurs de transmission, la distanciation physique, la contamination par gouttelettes ou aérosols… L’année 2020 a été un cours intensif sur la science des virus. «Comme tout le monde, j’avais vu des films de Hollywood sur les épidémies, raconte le premier ministre. J’avais aussi lu un roman dont l’action se passait pendant la grippe espagnole, en 1918. Mais c’est pas mal tout ! Il a fallu tout apprendre.»Les Québécois ont largement fait confiance à leurs dirigeants pour les guider pendant cette période sombre. Malgré la tragédie dans les CHSLD et un bilan plus lourd au Québec qu’ailleurs au Canada, la popularité du gouvernement Legault se maintient au sommet. Le ton direct et empathique du premier ministre a fait mouche. Les conférences de presse quotidiennes du trio LegaultArruda-McCann, suivies par trois millions de Québécois le printemps dernier, vont s’inscrire dans les manuels de gestion de crise, aux côtés des prestations du premier ministre Lucien Bouchard et d’André Caillé, alors président d’Hydro-Québec, lors de la crise du verglas en 1998. Malgré cette attention de la population et la présence de sa cellule de crise, François Legault avoue s’être senti seul par moments, à devoir prendre des décisions aux conséquences psychologiques et économiques importantes pour les Québécois. «On était constamment dans l’inconnu. J’étais chanceux d’avoir Martin Koskinen [son chef de cabinet]. Il a un jugement exceptionnel. Il fallait trancher, et ce n’était jamais noir ou blanc. Des gens pensent que je suis très sûr de moi, mais je doutais continuellement. Est-ce qu’on a pris la bonne décision ? Chaque jour, je demandais à Martin s’il était certain qu’on devait faire ça, mais lui aussi doutait.»La suite de l’aventure s’annonce tout aussi imprévisible, avec une deuxième vague qui n’en finit plus, une économie qui tangue et un vaccin à l’horizon. Nous avons rencontré le premier ministre à son bureau de Montréal, au début de novembre. «Personnellement, comment allez-vous ? J’oserais dire que ça va mieux. Les premières semaines, c’était presque irréel. Un peu effrayant. Je lisais les journaux du monde, je regardais CNN, j’essayais de comprendre où on s’en allait. Combien il va y avoir de décès au Québec ? Ça va durer combien de temps ? Les premières semaines, j’ai trouvé ça usant. J’avais déjà l’habitude de lire avant de me coucher, pendant une demi-heure ou une heure. Ç’a été mon évasion intérieure. Mais le sommeil ne venait pas toujours ! La lecture s’étirait sur deux ou trois heures. Après un certain nombre de mois, on finit par maîtriser la situation. Il fallait trouver l’équilibre entre sauver des vies et ne pas trop faire souffrir la population, ne pas susciter trop d’anxiété. J’ai mis beaucoup de temps à préparer mes points de presse. C’était important d’avoir un message équilibré. Les gens devaient se rendre compte de la gravité de la situation, mais sans paniquer. C’était une responsabilité énorme, mais c’est aussi un privilège d’avoir été choisi par les Québécois pour faire ça. Quel mot décrirait votre année ? Wow, c’est difficile... [Pause de cinq secondes] Je dirais «aider». Je suis nationaliste, j’aime aider les Québécois. C’est un privilège de pouvoir les aider, de tenter de sauver le maximum de vies. J’essaie d’être le leader qui permet aux Québécois de surmonter tout ça, j’essaie de donner de l’espoir. «Aider»aussi parce qu’il y a eu beaucoup de générosité:des milliers de Québécois se sont portés volontaires, sont venus aider, en faisant du bénévolat ou avec «Je contribue». Quelle a été votre plus grande réussite ? Former les 10 000 préposées aux bénéficiaires en trois mois pendant l’été. Je suis arrivé avec cette idée un matin. Ça faisait plusieurs jours que je demandais à Yvan Gendron [sous-ministre de la Santé] de combien d’employés on allait avoir besoin et j’étais incapable d’obtenir un chiffre précis. J’ai dit:«OK, ça va être 10 000 !»J’ai dit à Jean-François Roberge [ministre de l’Éducation] qu’il fallait y arriver avant la deuxième vague. Ce n’était pas évident de trouver des professeurs en été. On a reçu 71 000 candidatures ! On a fait ça en «bulldozant»le ministère de l’Éducation, le réseau de la santé, les syndicats. Avez-vous fait une erreur ? Quelque chose que vous aimeriez refaire différemment ? Non, je n’en vois pas. Quand je regarde la deuxième vague, je considère que 80 % des problèmes sont réglés dans les CHSLD. Il y aura 10 000 préposées de plus, bien payés, et il y a un responsable pour chacun des CHSLD, qui s’assure que le personnel porte les masques et qu’il y a de l’équipement. Ce qui reste à régler, c’est la disponibi-lité des infirmières. On ne peut pas travailler avec 50 % des infirmières à temps partiel. Avez-vous un regret ? Ne pas avoir augmenté les salaires des préposées aux bénéficiaires avant la crise. On avait mis de l’argent dans les CHSLD, mais la plupart des postes n’ont pas été pourvus parce que le salaire n’était pas assez attrayant. J’aurais dû augmenter les salaires plus tôt. Quand direz-vous «mission accomplie»? Lorsqu’il y aura un vaccin. Mais le jour où on passera à autre chose, mon travail ne sera pas terminé. La pandémie a accéléré des tendances, par exemple les achats en ligne ou l’éducation à distance. Ça va avoir des effets. Il y a aussi une prise de conscience au sujet de l’autonomie du Québec sur le plan alimentaire ou de l’approvisionnement en équipements de protection individuelle pour les travailleurs de la santé. Ça pourrait arriver, dans l’avenir, que les frontières se referment pour un moment; il faudra être autonomes dans certains secteurs. Est-ce que cette crise marquera votre carrière ? J’espère que non. Je suis fier de la manière dont on gère cette crise-là, mais on va en politique pour améliorer la société. Pour moi, l’important, c’est l’économie et la fierté des Québécois. Ça va bien, avec la loi 21 [sur la laïcité], et bientôt la nouvelle loi 101. On s’en vient avec des propositions en culture. Mon objectif est que les Québécois soient encore plus fiers d’être québécois. Ça va de pair avec le nationalisme économique:produire ici, acheter local, garder nos sièges sociaux, être aussi riches que l’Ontario et ainsi de suite. C’est pour ça que je suis en politique. Vos priorités ont-elles changé avec la pandémie ? Pas du tout. J’ai arrêté de m’occuper des autres dossiers en mars et en avril, mais depuis, à chaque conseil des ministres, je répète de ne pas oublier nos priorités. On a été élus pour faire avancer un certain nombre de dossiers et je m’attends à ce que d’ici deux ans, on ait livré la marchandise malgré tout. On a cinq priorités, et j’y tiens. D’abord, l’éducation, notamment les maternelles quatre ans pour agir tôt dans le développement des enfants, et avoir de belles écoles. Ensuite l’économie, j’y ai mis beaucoup de temps depuis cet été. Je souhaite faire exploser les investissements privés non résidentiels, autant par des entreprises québécoises qu’étrangères. Je veux réduire l’écart de richesse avec le reste du Canada. En 2019, j’avais réussi à faire passer celui avec l’Ontario de 15 % à 14 %. Je veux que ça continue à rétrécir. Dans les régions, on a promis que tout le monde aurait Internet haute vitesse, mais ce n’est pas simple. Je suis en contact avec le président de Bell et avec Pierre Karl Péladeau, de Vidéotron. Il faut que ça bouge. Puis, il y a le Plan pour une économie verte. Ça nous prend des trains, des tramways, des autobus scolaires et des camions électriques. En matière de gaz à effet de serre, notre principal défi, c’est le transport. On veut s’assurer, avec Hydro-Québec, la SAQ et Loto-Québec, qu’on encourage l’achat de camions électriques. On veut que les villes soient équipées d’autobus électriques. En santé, on continue de travailler à l’agrandissement des hôpitaux, à la diminution du temps d’attente aux urgences. S’il y a un bon côté à la pandémie, c’est toute la téléconsultation qui se fait en première ligne. Est-ce réaliste de revenir à l’équilibre budgétaire en cinq ans ? Il n’est pas question d’augmenter les taxes et les impôts, ou les tarifs, de plus que l’inflation. Ni de ne pas couvrir au moins les coûts du système en santé et en éducation. Il n’y aura pas d’austérité dans les dépenses. Il reste donc deux pistes pour atteindre l’équilibre budgétaire d’ici cinq ans. La première, c’est la croissance économique. Pousser très fort pour augmenter les revenus. Puis, il y a les discussions sur les transferts en santé avec le fédéral. Actuellement, Ottawa contribue à hauteur de 22 % des coûts du système de santé au pays; on lui demande d’augmenter à 35 %. Pour le Québec, ça voudrait dire six milliards de plus par année. Si on a ça, c’est très réaliste d’atteindre l’équilibre budgétaire en cinq ans. C’est un très gros «si»... Oui, un gros «si»… Pour Ottawa, ça signifierait des dizaines de milliards de dollars de dépenses de plus par année. On peut douter que le fédéral aille jusque-là. Justin Trudeau a diminué la hausse des transferts de 6 % à 3 % par année. L’argent qu’il a versé pendant la pandémie, ce n’est pas récurrent. Si je veux embaucher plus de personnel dans le réseau de la santé, plus de préposées aux bénéficiaires, ça me prend des sommes récurrentes. Sur cinq ans, un gros morceau du déficit fédéral est non récurrent. On aurait pu être plus gourmands et demander que le fédéral paie 50 % du total des dépenses en santé au Canada. Vu la situation, c’est raisonnable de penser qu’on va avoir un gain. Lorsque l’aide gouvernementale va cesser, craignez-vous la fermeture d’un grand nombre de commerces et d’entreprises ? En commerce de détail, le plus important, c’est d’où viennent les produits, où ils sont fabriqués. Je veux qu’il y ait plus de produits québécois sur Amazon. Ensuite, avec le Panier Bleu, on travaille à concurrencer Amazon. Il va y avoir moins de commerces de détail dans les prochaines années et plus d’achats en ligne. On aura le défi de convertir des centres d’achats en logements. On doit s’assurer d’avoir un réseau de distribution compétitif, depuis l’achat en ligne jusqu’à la maison. On va être là pour accompagner les entreprises. On avait le plein emploi avant la pandémie. D’ici un an à 18 mois, on devrait y revenir, mais il ne s’agira pas nécessairement des mêmes emplois. Il va y avoir beaucoup de création d’emplois en intelligence artificielle, en robotisation, en technologie de l’information... Ça va nous prendre du monde formé. On va entendre beaucoup les mots «requalifier les gens»vers différents secteurs. Avez-vous des craintes pour le centre-ville de Montréal ? Il y aura moins de gens dans les bureaux, les restaurants. Est-ce qu’une partie des bureaux va être convertie en logements ? Tous les centres-villes vont changer, mais ça ne veut pas dire que le PIB de Montréal ou du Québec va être modifié. La transition va être inquiétante, mais on va s’ajuster. La création de richesse va revenir. Êtes-vous inquiet pour le secteur touristique ? Les gens d’affaires se sont habitués aux logiciels Teams et Zoom, ils vont moins voyager. Mais les gens vont continuer d’aller en vacances. Je travaille avec notre ministre du Tourisme, Caroline Proulx, pour améliorer notre offre dans six régions:Laurentides, Estrie, Bas-SaintLaurent, Gaspésie, Saguenay–LacSaint-Jean et Québec-Charlevoix. Il faut augmenter l’offre d’hébergement et d’activités pour occuper toute la famille pendant une semaine. Même dans cinq ans, le monde va moins aller à l’étranger et plus dans nos régions. Le tourisme au Québec est appelé à croître de manière importante. Ce ne sera pas un désastre. Comment vivez-vous avec la contestation ? Des restaurateurs et des propriétaires de gym, notamment, voulaient défier les consignes sanitaires... Je n’aime pas ça, mais je vois des pays où c’est pas mal plus agressif que chez nous. C’est assez limité. On me dit d’ailleurs d’arrêter de lire les commentaires sur ma page Facebook ! Vous lisez les commentaires sur Facebook ? Ouch... J’y passe un peu de temps chaque soir, ne serait-ce que pour rester branché sur le terrain. C’est un peu désespérant, je l’avoue, mais quand on regarde les sondages, on voit que c’est une minorité. Des gens sont inquiets de leur situation économique, ont peur pour leur emploi, on ne peut pas négliger ça. Mais la majorité de la population comprend. Est-ce que la hausse des mouvements complotistes vous inquiète ? C’est assez limité. C’est plate à dire, mais plus il y a de gens infectés au Québec, plus il y a de chance que ces personnes-là connaissent quelqu’un, dans leur entourage, qui est infecté et comprennent que ça existe pour vrai. Il faut faire la différence entre les complotistes et ceux qui souffrent du manque de contacts sociaux. Je comprends très bien l’effet de la crise sur la santé mentale de façon générale. Quel serait votre plus beau cadeau de Noël ? Qu’on soit le plus possible en famille. Que ma mère de 91 ans voie ses petits-enfants. On est une quinzaine dans la famille chez nous, ce serait un beau cadeau de se voir un peu. Quelles sont les chances que cela se produise ? Il faudra voir à combien on limite le nombre de personnes. (Alec Castonguay) Horacio Arruda Sous tension À l’image de tous les chefs de la santé publique dans le monde, Horacio Arruda est passé de l’anonymat presque complet au statut de vedette en quelques jours au printemps. Il a basculé d’une vie paisible de fonctionnaire au «cauchemar»de la COVID-19, sous pression, constamment au centre de l’attention, à devoir faire des recommandations aux répercussions immenses qui ne plaisent pas toujours à la population — jusqu’à recevoir des menaces de mort. «Je n’ai qu’un désir:que ce virus soit derrière nous et qu’on puisse revenir à notre vie normale», affirme Horacio Arruda, figure de proue du vaisseau de la santé publique, composé des experts de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) et des directions régionales de santé publique. «C’est usant pour moi, pour nous tous. On essaie de faire le mieux possible avec ce qu’on a comme information. C’est dur, c’est exigeant, c’est un cauchemar qui perdure», dit-il. Entre le 12 mars et le 12 novembre, le gouvernement du Québec a tenu 148 conférences de presse sur la crise sanitaire. François Legault a participé à 106 d’entre elles et Horacio Arruda... à 127 ! Cette notoriété, le Dr Arruda l’échangerait volontiers contre un peu de quiétude. Il évoque la chanson «Je cherche l’ombre», de Céline Dion, lorsque je lui demande comment il vit avec l’attention des derniers mois, lui qui ne peut plus faire un pas dehors, même avec son masque et des lunettes de soleil, sans se faire aborder par des citoyens. «J’aimerais mieux ne pas être connu. Ça me fait un peu peur, les phénomènes de célébrité instantanée», confie-t-il, préci-À sant que la vaste majorité des gens sont très gentils envers lui. «Ce qui me ferait plaisir, c’est qu’on reconnaisse davantage le rôle de la santé publique dans notre société. Que notre travail pour améliorer le sort des gens, hors d’une pandémie, soit valorisé.»Sa plus grande crainte:perdre la confiance de la population, ce qui amenuiserait le respect des consignes sanitaires. «Ça me préoccupe beaucoup, avoue-t-il. La confiance des gens et ma crédibilité, c’est précieux.»Il affirme que s’il estimait ne plus être la bonne personne pour guider le gouvernement et les Québécois, il n’hésiterait pas à démissionner. Horacio Arruda a d’ailleurs tâté le terrain auprès de successeurs potentiels. «Il n’y a pas beaucoup de volontaires !»observe-t-il en riant, avant de reprendre son sérieux. «Les chefs de santé publique partout dans le monde personnifient les problèmes, que ce soit les morts lors d’une vague de chaleur ou dans les CHSLD pendant la COVID. Je le sais depuis le début. C’est dur pour l’orgueil, mais c’est ça.»Il n’a toutefois jamais pensé abandonner:«Je ne veux pas être un capitaine qui quitte son navire en détresse. J’aurais l’impression d’être un traître.»Le plus difficile pour un directeur national de la santé publique, c’est d’opérer au carrefour de la science, de la sociologie et de la psychologie humaine, étant donné que le comportement de chacun influence la progression du virus. «On fait affaire avec une population traversée par différents mouvements, idéologies et préoccupations, explique-t-il. Il faut prendre en considération comment l’autre va réagir. On est face à des valeurs individuelles qui s’entre-choquent avec le bien collectif. Ça rend la réponse au virus complexe et dure à trouver.»La pression vient de partout. De la population, des entreprises, de l’INSPQ, qui fait des recommandations scientifiques, et du gouvernement, qui doit appliquer les recommandations tout en permettant à la société de continuer à fonctionner. «J’ai l’impression de marcher constamment sur un fil de fer», lâche-t-il. Par exemple, dans un monde idéal, il y aurait deux fois moins d’élèves par classe. Cela nécessiterait toutefois deux fois plus d’enseignants et de classes, une solution qui est impossible à envisager. Le déplacement du personnel médical d’un établissement à un autre accentue le risque de transmission, mais la pénurie de maind’oeuvre rend son interdiction difficile à appliquer. «Il y a la science et il y a la réalité, dit Horacio Arruda. Les théoriciens alimentent nos réflexions, mais ils ne sont pas dans la gestion de risques. Ils sont dans un monde idéal. Or, la vie a toujours été une question de choix et de risques. Je vis en acceptant des décisions qui ne seraient pas mon premier choix, mais qui sont acceptables.» Il soutient que la gestion de la crise relève autant de la science que de l’art:«Chaque jour, je me couche en me disant que j’ai essayé de faire de mon mieux, et en sachant qu’on a peut-être commis une erreur. Mais dans une bataille contre un virus, l’absence de décision est aussi dangereuse que la décision elle-même. Je fais les recommandations les plus honnêtes possibles, mais je ne détiens pas la vérité. J’aimerais connaître l’avenir !»Et nous donc… (Alec Castonguay) Les scientifiques qui nous aident à comprendre Montrer la voie Des professeurs Tournesol parlant un jargon dans leur tour d’ivoire:cette image caricaturale des scientifiques a pris toute une claque en 2020 ! Face à un ennemi invisible qui a mis sur pause la planète au complet et a déjà tué plus de 1,2 million de personnes, ils se sont lancés dans la bataille, pour chercher des solutions et guider les politiques sanitaires, mais aussi pour nous donner l’heure juste. «La participation de la population, c’est au moins 80 % de la réponse à une épidémie. Le reste ne sert à rien si on n’a pas la confiance des gens. Les experts doivent se mobiliser, car ils ont plus de capital de confiance que les politiciens», dit Gary Kobinger, de l’Université Laval, impliqué dans la réponse aux épidémies depuis 14 ans. Gary Kobinger fait partie, avec Gaston De Serres, Benoît Mâsse, Caroline Quach-Thanh et Karl Weiss, des scientifiques à qui L’actualité a choisi de rendre hommage. Ils se sont illustrés par la qualité des nombreuses explications qu’ils ont données aux Québécois, en plus des autres efforts qu’ils ont déployés face à la pandémie. Bien informer la population exige un investissement de temps qui ne rapporte ni argent ni avancement de carrière, et de trouver de la place dans des agendas que la crise sanitaire a fait exploser. Ensuite, pour donner l’heure juste, il faut aller au-delà de ses propres activités de recherche, en suivant à la fois la littérature scientifique et les décisions des autorités, tout en décodant le contexte social et géopolitique. Finalement, il faut trouver le ton et les mots justes en faisant preuve d’empathie. Le microbiologiste Karl Weiss s’est imposé une discipline militaire pour affronter l’ennemi:se lever à 6 h pour lire les journaux scientifiques et suivre l’actualité internationale, enchaîner le travail clinique à l’hôpital, les réunions de coordination — notamment avec les 215 médecins microbiologistes-infectiologues québécois dont il préside l’association — et les entrevues aux médias, puis se coucher vers minuit et demi, après des tâches d’écriture. Il n’a pas pris une journée de congé de mars à mai. Gary Kobinger et la médecin Caroline Quach-Thanh, du CHU Sainte-Justine, ont tous deux travaillé de 16 à 18 heures par jour. Pendant la semaine et demie de vacances qu’elle a prise cet été, la pédiatre n’a fait que dormir. Elle espère tenir le coup pour la suite de la crise, qu’elle aimerait voir se terminer d’ici son 50e anniversaire, en mars 2022. Et après ? «Je ne serais pas étonnée de tomber en burnout !»raconte celle qui a l’impression de revivre le jour de la marmotte depuis mars dernier. À 65 ans, Gaston De Serres voyait 2020 comme... l’année où il allait commencer à lever le pied ! «En mars-avril, mon équipe recevait des demandes d’information du ministère de la Santé presque chaque heure. Il a fallu s’organiser très rapidement pour arriver à donner des avis scientifiques robustes, compréhensibles pour les décideurs et basés sur des études qui sortaient à un rythme effréné», relate le cialiste des maladies infectieuses à l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ). Toujours posé et rassurant, il a accordé au moins trois entrevues par jour depuis mars, à peine moins cet été. Le professeur Benoît Mâsse a quant à lui fait de l’éducation aux médias sa grande priorité, passant un temps fou à bien expliquer à chaque journaliste les subtilités de l’épidémiologie ou du design des essais cliniques, sans rien attendre en retour. «J’ai appris à vulgariser en travaillant sur la prévention du VIH dans les régions rurales de l’Afrique du Sud. Je me suis bien planté les premières fois !»racontet-il, les yeux rieurs derrière ses lunettes carrées. Bien d’autres scientifiques ont multiplié les efforts sur tous les fronts. «En quelques semaines ce printemps, les Fonds de recherche du Québec ont reçu 700 propositions de projets», souligne le scientifique en chef de la province, Rémi Quirion. Pour coordonner les efforts afin que les études les plus cruciales soient attaquées en priorité, il a collaboré avec le ministère de la Santé et des Services sociaux ainsi que celui de l’Économie et de l’Innovation et créé le Réseau québécois COVID-pandémie (RQCP), qui réunit des milliers de spécialistes de toutes les disciplines, de la virologie à la robotique en passant par l’organisation des soins et l’éducation. Dans bien des cas, ces nouveaux projets se sont ajoutés plutôt que substitués aux activités habituelles. Quand Gary Kobinger s’est mis à la recherche d’un vaccin contre le SRAS-CoV-2, par exemple, il n’a pas mis sur pause ses essais d’un vaccin contre le VIH ! Dans l’anonymat des labos, les professionnels de recherche et les étudiants des cycles supérieurs sont nombreux à avoir dû remplacer leurs patrons débordés ou changer de sujet au milieu de leur thèse, tout en étant souvent loin de leur famille — plus du tiers des étudiants aux cycles supérieurs sont étrangers. «Étudiants et professionnels de recherche ont joué un rôle fondamental», insiste Nathalie Grandvaux, codirectrice du RQCP. À tous, chapeau bas ! Benoît Mâsse Biostatisticien, professeur à l’École de santé publique de l’Université de Montréal et chef de l’Unité de recherche clinique appliquée au Centre de recherche du CHU Sainte-Justine Quand le coronavirus fait son apparition, le chercheur de 58 ans travaille à un grand essai clinique sur la prévention de l’obésité chez les enfants chinois, avec des collègues de Shanghai. Mais il connaît bien les maladies infectieuses, lui qui a passé sept ans à Seattle comme statisticien en chef du HIV Prevention Trials Network, un réseau de recherche sur la prévention du VIH. Mi-février, les chiffres l’inquiètent. «J’ai écrit à une ancienne collègue, membre de l’équipe de modélisateurs de l’Imperial College de Londres [qui a fait les premières projections sur la pandémie], pour savoir si, comme moi, elle pensait qu’on allait droit dans le mur. Elle m’a répondu:“Prépare-toi à vivre en dedans pendant longtemps !”»Sachant que l’adhésion de la population aux mesures de santé publique n’est jamais acquise, le chercheur se soucie toujours, dans ses nombreuses interventions publiques, de donner l’heure juste, mais aussi de proposer des idées pour nous aider à mieux vivre. «Le gouvernement ne doit pas qu’interdire», insiste-t-il. Lui-même joueur de hockey à ses heures, il sait que remplacer un sport d’équipe par une marche dans le quartier n’a rien de palpitant. Le biostatisticien s’est impliqué dans la modélisation des projections de la pandémie réclamée par l’INSPQ et travaille à des modèles qui aideront à guider les futures campagnes de vaccination. Il garde toutefois du temps pour ses étudiants, qu’il ne veut surtout pas laisser tomber pendant cette crise. «Benoît en fait beaucoup pour encourager les jeunes et les faire progresser», souligne un de ses collègues et anciens étudiants, le professeur Simon de Montigny. Gaston De Serres Épidémiologiste à l’Institut national de santé publique du Québec Médecin de famille venu à l’épidémiologie lors de l’épidémie de rougeole qui a frappé le Québec en 1989, professeur à l’Université Laval jusqu’en juin 2020, Gaston De Serres a rejoint l’Institut national de santé publique du Québec dès sa création, en 1998. Depuis mars dernier, jour après jour, il analyse les données sur la pandémie, pour comprendre où et comment la maladie se propage à chaque instant. Il donne du sens aux chiffres qu’on s’est habitué à surveiller. Dans l’ombre, il joue un rôle crucial pour alimenter les décisions prises par Québec, partageant son temps entre analyses, réunions et collaborations avec d’innombrables chercheurs, en compagnie desquels il recueille les données qui manquent afin de mieux gérer la crise. Durant l’été, il a notamment piloté une enquête menée en un temps record auprès de 5 000 des 13 000 travailleurs de la santé ayant contracté la COVID-19 lors de la première vague. Le rapport de près de 80 pages publié mi-octobre permet déjà de tirer des leçons. Pilier du Comité sur l’immunisation du Québec, dont il fait partie depuis 20 ans, le médecin est reconnu internationalement pour ses analyses de la sécurité des vaccins, veillant à ce qu’on n’en fasse ni trop ni trop peu pour protéger la population. Sous ses allures de grand-papa un peu échevelé, aussi calme que chaleureux, se cache un redoutable esprit critique. Il ne tient jamais rien pour acquis. «L’OMS dit quelque chose ? Avant d’y croire, il va vouloir voir les données !»lance l’anthropologue Ève Dubé, une de ses collègues à l’INSPQ, dont il a été le mentor. «Au-delà de 10-12 heures de travail par jour, je ne suis plus efficace», reconnaît-il en riant. Regarder District 31 et retrouver, quand c’est autorisé, ses quatre enfants et six petits-enfants constituent autant de pauses essentielles pour garder les idées claires. Avec l’arrivée imminente de vaccins, il sait que ses prochains mois seront encore plus éreintants que les précédents. Caroline Quach-Thanh Pédiatre, microbiologisteinfectiologue, professeure à l’Université de Montréal et médecin responsable de la prévention et du contrôle des infections au CHU Sainte-Justine Chaque dimanche depuis mars, vers 8 h, la Dre Caroline Quach-Thanh est au micro de Radio-Canada Première. Elle n’a manqué qu’une semaine ! «Excellente communicatrice, rigoureuse et experte dans plusieurs disciplines, à jour sur les décisions, critique, souriante et terriblement empathique», voilà les qualités que lui prête l’animateur de Dessine-moi un dimanche, Franco Nuovo. La pandémie a plongé la Dre QuachThanh dans un tourbillon d’activités. Dès le 15 janvier, elle prévient son directeur général et les équipes de première ligne que le virus approche, et commence les préparatifs. Prudente, elle consigne tous ses avis, pour que la crise puisse être bien documentée. Parcourant l’hôpital de réunion en réunion, accrochée à chaque instant dans les couloirs pour donner son avis sur un patient, un équipement ou une procédure, téléphone à la main pour rester joignable en tout temps, elle maîtrise la situation. «Ce qui m’a beaucoup rassurée, c’est que je n’ai jamais pris une décision seule», raconte-t-elle. Présidente du Comité consultatif national de l’immunisation, qui conseille le fédéral en la matière, elle travaille aussi au Centre d’étude de vaccins du Centre universitaire de santé McGill, où elle supervise six étudiants aux études supérieures. En juin, elle a reçu 2,1 millions de dollars des Instituts de recherche en santé du Canada pour étudier le risque de réinfection chez 735 travailleurs de la santé infectés au cours de la première vague. «Caroline est extrêmement intelligente et elle a toujours travaillé très fort», dit le pédiatre Jean-François Chicoine, un de ses collègues à SainteJustine, qui l’a connue alors qu’elle était jeune étudiante. «Elle ne s’énerve jamais, mais elle n’est pas froide pour autant !» Gary Kobinger Directeur du Centre de recherche en infectiologie de l’Université Laval et membre du Groupe consultatif stratégique et technique de l’OMS sur les risques infectieux Quand la Chine signale à l’Organisation mondiale de la santé les premiers cas de pneumonie atypique, en décembre 2019, Gary Kobinger est aux premières loges, comme membre du groupe de 13 experts qui conseille l’OMS sur les risques infectieux. Il comprend vite que le virus fera mal. Le microbiologiste natif de Québec a tout un bagage pour affronter une pandémie. Sur le plan scientifique, il est considéré par bien des pairs comme un génie. Il a d’ailleurs raflé des prix innombrables, notamment après avoir découvert le premier vaccin contre le virus Ebola. Sur le plan humain, il place l’intégrité et le partage au-dessus de tout. «Quand on publie des articles avec des chercheurs africains, il se met toujours au milieu de la liste des auteurs, la place la moins prestigieuse», raconte son étudiant MarcAntoine de La Vega, qui le suit depuis 2012. Dès janvier, son labo de Québec a adapté au coronavirus sa recette de base de vaccin conçue pour enrayer des virus émergents. Levé aux aurores pour les réunions de l’OMS, Gary Kobinger partage le reste de ses journées entre la recherche, les échanges avec Ottawa et des entreprises pharmaceutiques, la gestion de sept laboratoires mobiles déployés dans le nord du Canada pour diagnostiquer la COVID-19, l’enseignement, les médias et les conférences. Homme de conviction, il a démissionné avec fracas en septembre du groupe de travail fédéral sur les vaccins contre la COVID, qui refusait de dévoiler publiquement les conflits d’intérêts de ses membres. «Il n’y avait aucune raison d’être si secret !»s’insurge Gary Kobinger. Après des années sans vacances, le chercheur de 51 ans veut ralentir en 2021, pour passer plus de temps en famille et s’occuper de sa ferme en Mauricie. Il souhaite aussi faire grandir GuardRX, l’organisme sans but lucratif qu’il a créé pour élaborer des vaccins et traitements gratuits. Karl Weiss Chef de la Division des maladies infectieuses à l’Hôpital général juif de Montréal, professeur de clinique à l’Université de Montréal et président de l’Association des médecins microbiologistes-infectiologues du Québec Mordu d’histoire, le Dr Karl Weiss sait que les maladies infectieuses ont façonné l’humanité — il est intarissable sur le sujet. Dans la guerre au coronavirus, le chercheur clinicien s’est comporté en stratège. Première étape:préparer son hôpital. Fin janvier, les commandes d’équipements ont été envoyées, les patients qui avaient voyagé là où le virus sévissait ont été isolés. «Après, je suis descendu dans les tranchées pour comprendre vraiment ce qui se passait», raconte le Niçois d’origine. L’expression «les tranchées», par laquelle il désigne le travail des soignants auprès des patients, revient souvent. «Dans une crise, le gouvernement doit maîtriser la stratégie, mais les décisions tactiques doivent se prendre sur le terrain. Ce sont les infirmières qui savent comment elles doivent s’organiser», insiste-t-il. Mi-avril, Karl Weiss, d’un tempérament plutôt stoïque, a eu peur. «Pas pour moi ni pour ma famille, ni à l’hôpital, aussi sécuritaire que l’intérieur d’une centrale nucléaire, mais en voyant la pandémie se répandre malgré tous nos efforts.»Pendant l’été, il a soufflé, renoué un peu avec la natation et s’est préparé à la deuxième vague, qu’il savait inévitable. «On ne fait pas la prochaine guerre comme on a gagné la première.»Son collègue infectiologue Matthew Oughton estime que peu de gens ont autant de connaissances que lui dans des champs variés. «Il sait aussi s’y prendre pour que les choses bougent, dans le travail quotidien à l’hôpital ou sur le plan politique.»Durant cette crise, ses internes ont également pu profiter amplement de son expertise. «Ils sont les héritiers de cette histoire, et seront au front dans la prochaine guerre», dit Karl Weiss. (Valérie Borde) Marie-Ève Lévesque À la rescousse des parents Chère madame Marie-Ève, Je sais que votre nom est Marie-Ève Lévesque, mais permettez-moi de m’adresser à vous telle que vous êtes apparue dans la vie des familles québécoises le 31 mars dernier. À ce moment-là, il faisait encore froid et gris. Les enfants tournaient en rond dans les maisons. Nous, parents, étions soit en train de nous adapter au télétravail, soit pris d’angoisse après avoir perdu notre boulot, soit anxieux de devoir sortir faire un travail jugé essentiel, composant tant bien que mal avec le cassetête que représentait la perte soudaine des garderies et écoles. Après deux semaines chaotiques remplies de bien plus de temps d’écran que d’activités éducatives, bon nombre d’entre nous avons commencé à nous inquiéter du retard scolaire que prenaient nos enfants. Il était évident que les cours ne reprendraient pas de sitôt; mais que faire ? Dans le réseau scolaire, tout était à l’arrêt. Il n’y avait pas moyen de récupérer les manuels laissés à l’école. Le ministre Jean-François Roberge a promis de l’aide pour que nous fassions nous-mêmes de la «consolidation d’apprentissages»à la maison. Quand cette aide s’est révélée prendre la forme d’un répertoire hétéroclite de sites Web, mon découragement a été grand:comment étais-je censée savoir quelles notions faire réviser ? Le ministère de l’Éducation pensait-il que j’avais le temps d’assimiler le programme pédagogique de deux niveaux scolaires, d’évaluer où se situait la progression de mes enfants, puis d’éplucher des dizaines de sites pour bâtir des exercices maison ? J’ai bien tenté de me transformer en maîtresse d’école chaque midi; ce fut un échec ponctué de crises de nerfs et de chicanes. Je me suis ensuite jetée sur une trousse pédagogique envoyée par le Ministère. Elle contenait des activités comme regarder une vidéo sur le python royal et faire des exercices dans le salon. J’ai commencé à redouter que mes enfants ne finissent jamais leurs 2e et 5e années. Et c’est à ce moment, madame Marie-Ève, que j’ai appris votre existence. Tous les jours, vous donnez un cours gratuit de 30 minutes pour chaque année du primaire. Suffit de cliquer sur la vidéo de la journée et bingo! chaque enfant reçoit un cours de mathématiques ou de français. Matière pertinente, explications claires, exercices à la portée des élèves. Exactement ce dont nous avions besoin. Mais le plus beau est la façon dont vous enseignez. Dans notre quotidien maussade, vous êtes un rayon de soleil. Vous expliquez multiplications et accord du participe passé avec un enthousiasme contagieux. Vous racontez des histoires. Vous épatez votre public lorsque vous écrivez sur du plexiglas de façon à ce que les lettres et chiffres apparaissent dans le bon sens à l’écran (subterfuge en postproduction, dévoile votre producteur; mais chut ! ne le dites pas aux enfants, qui pensent que vous êtes capable d’écrire à l’envers). En mai, vous interviewez même des vedettes en direct ! Ça peut sembler banal, mais en ces journées interminables de confinement total, dîner avec David Saint-Jacques ou Luc Langevin prend des allures de fête dans ma maison. À la rescousse des parents Les liens vers cette Classe en ligne que vous animez se répandent comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux. En avril, 35 000 enfants en moyenne suivent chaque jour vos cours. L’ensemble de vos vidéos accumule à ce jour 1,75 million de vues sur YouTube ! Vous deviez à l’origine vous arrêter après un mois, mais à la demande générale, l’entreprise qui produit La classe en ligne (Succès scolaire, qui offre des services de tutorat) vous propose de continuer jusqu’à la mi-juin. Vous travaillez de longues heures à préparer les cours du lendemain, après avoir passé cinq heures en matinée dans le studio d’enregistrement. Ça vaut la peine d’être souligné, parce qu’à la mi-mai, vous recommencez (comme la plupart des enseignants du Québec) à enseigner à distance à vos élèves de l’école primaire Sainte-Claire de Longueuil. Madame Marie-Ève, vous êtes l’une des figures phares de l’année 2020 parce que votre travail a été une véritable bouée de sauvetage pour des milliers de parents désemparés. Votre classe virtuelle, produite par une petite équipe privée, a éclipsé la grosse machine du ministère de l’Éducation. Votre personnalité rayonnante a fait le reste. Il serait toutefois injuste de vous rendre hommage sans parler de vos consoeurs et confrères qui, sans devenir des vedettes, se sont aussi démenés pour venir en aide à leurs élèves à distance. L’année n’a pas été très propice à l’apprentissage scolaire, c’est le moins qu’on puisse dire, mais aux quatre coins du Québec, il s’est quand même produit des miracles. Et c’est pour cette raison que je vous adresse à vous, madame Marie-Ève, ainsi qu’aux enseignants qui ont poussé à l’extrême cette année leur amour du métier, un énorme merci de la part des enfants et des parents du Québec. Claudine St-Germain Laurent Duvernay-Tardif Un champion au front Laurent Duvernay-Tardif n’est pas un footballeur comme les autres. Depuis 2018, le garde des Chiefs de Kansas City est aussi diplômé en médecine, le premier parmi les joueurs actifs de l’histoire de la NFL. Le géant sympathique au sourire charmeur a marqué le Québec en 2020 en montrant ses valeurs sur deux terrains complètement différents. Le 2 février, Laurent Duvernay-Tardif devient le premier Québécois à remporter le Super Bowl. Quelques jours après son retour triomphal, le Québec est mis sur pause, et l’athlète de 29 ans a la bougeotte. Il veut aider la population, mais ne peut pas travailler comme médecin, n’ayant pas encore fait sa résidence. Le Montérégien répond alors à l’appel du gouvernement et rejoint l’équipe du CHSLD Gertrude-Lafrance, à Saint-Jean-sur-Richelieu, où il va passer neuf semaines. L’expérience du travail en CHSLD le bouleverse, et il prend la décision de ne pas disputer la prochaine saison de la NFL en raison des risques liés à la COVID-19, quitte à perdre sa place pour de bon auprès des Chiefs. Son agenda est très chargé:avec la deuxième vague, il a repris du service, deux jours par semaine, en CHSLD, où il accomplit des tâches de préposé aux bénéficiaires et d’infirmier; il suit des cours à distance en santé publique à l’Université Harvard; et il dirige la fondation portant L son nom, qui fait la promotion du sport et de la vie saine chez les jeunes, tout en préparant son retour au jeu en 2021. Gagner le Super Bowl «Je me souviens parfaitement de toutes les sensations que j’ai ressenties lors de la victoire. Les confettis jaunes et rouges qui tombaient du ciel, le bonheur de serrer dans mes bras ma famille en pleurs, l’instant où j’ai embrassé la coupe:c’était une joie immense et explosive. Je n’ai pas vécu de moment de flou, chaque seconde est claire, gravée dans ma tête. «En tant que footballeur, tu t’imagines tout le temps aller jusqu’au bout. À tel point que tu es toujours surpris quand tu perds en séries. Cette année, la saison a été particulièrement intense:on tirait de l’arrière à chacun des matchs et on a dû apprendre à revenir de situations difficiles. Mais ça a renforcé nos liens, ça nous a donné plus de confiance et de force de savoir qu’on était capables de se relever, même dans les pires moments. Le match du Super Bowl a été représentatif de cette dynamique. «Le tourbillon est arrivé après la victoire:les centaines de messages textes, le manque de temps pour dormir, le retour à Kansas City pour défiler devant un million de personnes, le retour à Montréal avec un autre défilé devant 4 000 personnes… Au Québec, les gens étaient fous, et fiers ! Dans la rue, les autos s’arrêtaient, les passants venaient me voir. C’était émouvant de sentir à quel point tout le monde était derrière moi. C’est une euphorie difficile à décrire, c’est enivrant. «J’étais en plein coeur de cette période de pure folie quand boum ! du jour au lendemain, tout a été mis sur pause.» Travailler en CHSLD «J’ignorais dans quoi je m’embarquais. Je n’ai pas encore fait ma résidence, il m’était donc impossible de rejoindre une équipe en tant que médecin, mais quand le gouvernement a lancé un appel pour les CHSLD, j’ai décidé d’y aller comme préposé. «J’ai eu la chance d’avoir comme mentors des infirmières inspirantes. Je suis arrivé avec une mentalité d’étudiant en médecine très orienté vers le soin immédiat:on se concentre sur l’état d’un patient, puis on se rend à la chambre suivante, sans nécessairement voir tout ce qui se passe autour. Au CHSLD, il faut changer les culottes, aider les personnes à manger, les lever... Ça me frappe de constater combien on peut aider les gens en accomplissant des gestes simples, comme couper les cheveux ou contacter la famille pour que le patient puisse discuter virtuellement. «Le plus difficile, ce sont les chambres vides. Tu te retrouves devant un lit inoccupé, les médicaments du patient dans les mains. Ces moments m’ont profondément marqué. C’est très froid de mourir dans ces conditions, même si on essaie d’être le plus chaleureux possible. Les décès nous sont rappelés constamment, parce que les chambres restent vides. «Je vois aussi beaucoup de belles choses. Au CHSLD, j’ai été témoin d’entraide pure. La résilience du personnel me surprend chaque jour. On dit que le football représente le summum de l’esprit d’équipe, mais quand je vois une infirmière prolonger son quart de travail de 4 heures pour éviter à sa collègue d’en faire un double de 16 heures, je me dis que c’est ça, le vrai esprit d’équipe.»(Marie Boule) Joyce Echaquan La preuve ultime Un électrochoc collectif. C’est ce qu’a administré aux Québécois la vidéo-vérité de Joyce Echaquan, une séquence d’un peu plus de sept minutes sur son lit de mort alors qu’elle demandait de l’aide sous les commentaires racistes de deux personnes censées la soigner, au Centre hospitalier régional de Lanaudière, à Joliette. Tout le Québec a pu être témoin de l’agonie de cette Attikamek de 37 ans et du mauvais traitement qu’elle a subi. En diffusant en direct la vidéo sur les réseaux sociaux, la mère de sept enfants a rendu intolérable toute complaisance par rapport au racisme que vivent les Autochtones. Une mort de trop, dirait-on. Une mort laide, qui a provoqué un sursaut d’écoeurement. Cette vidéo est une douloureuse illustration de ce qu’avait décrit un an plus tôt le rapport de la commission Viens, près de 800 pages préconisant 142 mesures pour améliorer les services offerts aux Autochtones en santé, en éducation, dans les services sociaux et en matière de justice. Un rapport dont les annales incluent une vingtaine de témoignages qui visent directement l’hôpital de Joliette ainsi que les services de santé et sociaux de la région. Dans l’année qui a suivi, seules 2 des 142 mesures du rapport ont été mises en application. Puis il y a eu la mort de Joyce Echaquan. Joyce Echaquan est devenue un symbole. Le symbole des préjugés qui enlèvent toute crédibilité aux patients autochtones. Le symbole d’une épidémie d’indifférence qui enferme les Autochtones dans une espèce de gros CHSLD que l’État aurait négligé non pas depuis U 30 ans, mais depuis des siècles, et dont on aurait jeté la clé dans un égout. Le symbole d’un système colonial qui depuis trois siècles a entrepris de déposséder, d’effacer les Autochtones. Plus encore que les blocus autochtones de l’hiver dernier, plus encore que les violences contre les pêcheurs de homards micmacs de NouvelleÉcosse au début d’octobre, la mort en direct de Joyce Echaquan amène bien des Québécois à remettre en question l’idée qu’ils se font d’eux-mêmes. Après une rencontre d’urgence qui a réuni en ligne 350 personnes — des ministres, des intervenants et beaucoup d’Autochtones —, où les politiciens avaient eu pour consigne d’être en mode écoute, le ministre fédéral des Services aux Autochtones, Marc Miller, a promis un plan dès janvier. Le fédéral, de qui relève la Loi sur les Indiens, cette vieille loi d’apartheid qui régit le devenir des Autochtones, est loin de donner l’exemple aux provinces. Les enquêtes ont été faites mille fois, les conclusions du rapport Viens sont limpides:les deux paliers de gouvernement ne rendent pas tous les services qu’ils sont censés rendre. Au Québec, le premier ministre François Legault a déclenché une enquête publique du coroner sur la mort de Joyce Echaquan et changé de ministre des Affaires autochtones. Et tandis qu’à Joliette les ambulances transportant des Autochtones sont encore détournées vers Terrebonne et Repentigny, le rapport de la commission Viens est devenu une lecture obligatoire dans les CISSS de la province. La vidéo scandaleuse de Joyce Echaquan a montré que le racisme existe aussi au Québec, pas seulement aux États-Unis. En mode rattrapage, de plus en plus de Québécois comprennent désormais ce qu’est le racisme systémique, ce que le premier ministre François Legault s’obstine à nier. Si les Autochtones sont plus malades que la moyenne des Québécois, c’est entre autres parce qu’ils sont mal soignés, mal logés. S’ils sont sousdiplômés, c’est parce qu’ils sont mal scolarisés. S’ils sont plus nombreux dans les prisons, c’est parce que la police et la justice les ciblent. S’il y a plus d’enfants autochtones séparés de leurs parents, c’est parce que la DPJ est plus sévère à leur endroit. Toutes les études le confirment. Les solutions sont connues, mais la résistance est telle que rien ne bouge. Il y aura un avant et un après Joyce Echaquan, parce qu’il n’est plus possible de nier le racisme systémique. Il n’est plus possible pour le gouvernement fédéral de justifier son maintien de la Loi sur les Indiens. Il n’est plus possible pour l’État québécois d’abdiquer ses responsabilités envers les Autochtones. Si les Québécois veulent réellement prétendre à être «quelque chose comme un grand peuple», comme le disait René Lévesque lorsqu’il est devenu premier ministre, la raison et l’honneur réclament désormais que la majorité s’élève au-dessus d’ellemême pour réparer les torts qu’elle a infligés, et qu’elle inflige toujours, à cette très petite minorité qui fut jadis une majorité, par ailleurs fondatrice du pays, on a trop tendance à l’oublier. C’est la seule issue possible. Pour que les enfants de Joyce Echaquan dirigent un jour le CISSS de Lanaudière. Pour qu’ils puissent être ministres. Ou pour qu’ils aient tout simplement la chance de mener une vie normale, d’être soignés, éduqués et jugés sans discrimination. (Jean-Benoît Nadeau) Ces aides-soignantes sont associées à une sorte de dégoût — la déchéance du corps, la démence, la mort — qui contribue à les garder dans l’ombre. «On a été témoins de scènes qui resteront en nous pour toujours. Quelle souffrance de voir s’éteindre tant de personnes loin de leur famille, sans que le dernier mot ait été dit.» Guylène Gabriel, préposée aux bénéficiaires au CHSLD Paul-Gouin, à Montréal Le jour où on passera à autre chose, mon travail ne sera pas terminé. La pandémie a accéléré des tendances, par exemple les achats en ligne ou l’éducation à distance. Ça va avoir des effets. Bien informer la population exige un investissement de temps qui ne rapporte ni argent ni avancement de carrière, et de trouver de la place dans des agendas que la crise sanitaire a fait exploser. |
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La Nouvelle Union (site web, aussi paru dans La Presse Canadienne) - 2020/12/30 |
Par Stéphane Lévesque Sur les médias sociaux, le ministre de la Santé et des Services sociaux Christian Dubé s’est réjoui de l’arrivée des premières 32 500 doses du vaccin de Moderna. «Nous allons les administrer dès la semaine prochaine. Les équipes prennent du rythme et ont déjà vacciné plus de 25 000 personnes. Avec cette livraison, on va accélérer la cadence», promet Christian Dubé. Dans la distribution des vaccins, rappelons que le gouvernement du Québec priorise les personnes vulnérables et en grande perte d’autonomie qui résident dans les centres d’hébergement et de soins de longue durée ou dans les ressources intermédiaires et de type familial et les travailleurs du réseau de la santé et des services sociaux en contact avec des usagers. |
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Le Journal de Montréal (site web, aussi paru dans Le Journal de Québec et 24 Heures Montréal) - 2020/12/31 |
JULES RICHER Grâce à l'approbation coup sur coup de deux vaccins efficaces à la fin de 2020, la pandémie de COVID-19 a changé complètement de visage. On est passé du stade d'hypothétiques remèdes miracles contre la maladie à l'administration des premières doses de vaccins. À CE MOMENT-LÀ, LE QUÉBEC DEVRAIT AVOIR REÇU PLUS DE 250 000 DOSES DES VACCINS DE PFIZER ET DE MODERNA Maintenant, selon les experts, il est assuré qu'on assistera, pour le début de 2021, aux premiers reculs dans la propagation du coronavirus chez les personnes vulnérables. «À la fin de janvier, on commencera à voir un premier impact [positif] dans les CHSLD », souligne le Dr Gaston De Serres, médecin épidémiologiste à l'Institut national de santé publique du Québec. Ces propos rejoignent ceux du grand responsable de l'opération vaccin aux États-Unis, Moncef Slaoui, qui prédit une «baisse significative» des décès chez les personnes âgées américaines d'ici la fin du mois prochain. 1,2 MILLION DE DOSES D'après les dernières évaluations d'Ottawa, le Canada devrait avoir reçu à ce moment-là 1,2 million de doses des vaccins de Pfizer et de Moderna, sans compter possiblement celles d'AstraZeneca (voir encadré). De ce nombre, le Québec obtiendra une quantité de doses au prorata de sa population, soit environ 264 000. Cela représente 132 000 personnes inoculées, puisque deux injections sont nécessaires. Rappelons que Québec a placé les résidents des CHSLD et des ressources intermédiaires au sommet de la liste des priorités pour les vaccinations. On estime à 40000 le nombre de personnes âgées qui habitent dans ces établissements. Les travailleurs de la santé seront également vaccinés en priorité. Comme d'autres responsables des inoculations, le Dr De Serres a constaté «une certaine circonspection par rapport aux premières doses» chez ces travailleurs, qui hésitent donc à se faire vacciner. «Mais plus il va y avoir de personnes vaccinées, plus ça va rassurer ceux qui sont inquiets », explique-t-il. Pour l'instant, note-t-il, les inoculations sont ralenties par l'approvisionnement des doses, pas par la capacité du système de santé québécois à les effectuer. «Actuellement, le goulot d'étranglement, c'est l'approvisionnement.» CAMPAGNES MASSIVES Au Québec, on a l'expérience de campagnes massives de vaccination, par exemple comme celle contre la grippe H1N1, en 2008, où en seulement deux mois 4,4 millions de doses avaient été administrées. «Aussi, ce qu'on espère, c'est que le plus grand nombre de vaccins soient homologués le plus rapidement possible dans les prochains mois », affirme le médecin. Mais, assurément, croit le Dr De Serres, la progression du développement des vaccins contre la COVID-19 a quand même dépassé toutes les espérances. «Pour les deux vaccins [approuvés au moment de l'entrevue], les choses se sont déroulées aussi bien qu'elles le pouvaient ; c'est très positif.» Est-ce rassurant à l'égard d'autres pandémies éventuelles ? Le Dr De Serres met un gros bémol. Pour lui, le passé n'est pas nécessairement garant de l'avenir. «On a une autre pandémie, celle du VIH, pour laquelle, 40 ans plus tard, on n'a toujours pas de vaccin efficace », dit-il. «Alors, il ne faudra surtout pas croire que, si cette fois-ci ça va bien parce qu'on a trouvé la martingale [la formule miracle], on saura comment faire pour toutes les nouvelles infections.» |
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L'Hebdo Journal (site web, aussi paru dans L'Hebdo du Saint-Maurice, L'Écho de Maskinongé, L'Écho La Tuque) - 2020/12/30 |
Dans les 24 dernières heures, le CIUSSS de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec a recensé 146 nouveaux cas de COVID-19. De ce nombre, 34 cas ont été recensés en Mauricie et 112 au Centre-du-Québec. On déplore également trois décès, soit un en CHSLD et deux en ressources intermédiaires ou résidences privées pour aînés. En Mauricie, les nouveaux cas sont concentrés à La Tuque (+2), Trois-Rivières (+22), Shawinigan (+8) et deux dans le MRC de Maskinongé. À Trois-Rivières, la résidence Myosotis rapporte six nouveaux cas confirmés, soit un chez ses employés et cinq parmi les résidents. On remarque une diminution de quatre hospitalisations dans la région, 43 personnes étant hospitalisées en ce moment, dont six (+1) aux soins intensifs. Au total, 94 personnes se sont rétablies de la COVID-19 depuis le dernier bilan, mardi. |
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La Tribune (site web) - 2020/12/31 |
Serge Denis Réjean Hébert n’a pas décoléré de l’année. Et l’ancien ministre de la Santé ne voit pas l’heure où il pourra desserrer les dents au cours des prochains mois. « Depuis le début de la pandémie, on a assisté au même vieux réflexe de priver les personnes âgées de la présence de leurs proches aidants », déplore le gériatre de formation, qui a longtemps dirigé la faculté de médecine de l’Université de Sherbrooke, ainsi que le Centre de recherche sur le vieillissement de l’Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke où il a aussi été chercheur. « Pourtant, on sait pertinemment qu’ils peuvent faire la différence en apportant des soins spécifiques et qu’ils ne sont pas un facteur de propagation du virus. Ces gens-là font tellement attention pour ne pas contaminer leurs proches qu’ils prennent toutes les précautions nécessaires », plaide-t-il. Membre du collectif Action COVID, qui regroupe des professionnels de la santé et d’autres disciplines, le Dr Hébert pointe également l’absence de répondants pour assurer la sécurité des résidents dans les CHSLD. « Il y avait cinq niveaux hiérarchiques entre les établissements et les personnes qui devaient réagir aux problèmes. Alors vous comprenez que ça prend un certain temps avant que ça se règle, déplore-t-il. Même avec les cadres nommés par le gouvernement, est-ce qu’ils ont l’autorité pour faire le travail adéquatement? » se demande-t-il. Dr Réjean Hébert Il faut absolument que nous prenions collectivement le virage afin que ça ne se reproduise jamais. La mobilité du personnel et le dépistage systématique devraient également figurer parmi les priorités du ministère de la Santé afin d’éviter que se poursuive l’hécatombe chez les personnes âgées, croit Réjean Hébert, en évoquant un « âgisme systémique » qui s’est installé dans une certaine indifférence. « Les vieux allaient mourir de toute façon », ironise-t-il dans une de ses nombreuses lettres acheminées aux médias en 2020. « Ce n’est pas normal que les principales éclosions aient été dans le réseau de la santé et dans les résidences pour personnes âgées, s’indigne l’ex-député de Saint-François. Quand la crise sera contrôlée, il faudra de toute urgence entreprendre un vaste chantier pour favoriser le maintien à domicile des personnes âgées. La société québécoise sera la plus âgée en Amérique du Nord en 2031, reprend-il. J’espère que cette crise provoquera un plan d’action vigoureux. Il faut absolument que nous prenions collectivement le virage afin que ça ne se reproduise jamais. » |
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Radio-Canada (site web) - 2020/12/30 |
Après le vaccin, il faut prévoir environ 14 jours avant la montée des anticorps, explique la santé publique. Fanny Samson La COVID-19 continue de se répandre au CHSLD Saint-Antoine, premier lieu de vaccination au Canada. Plus de 80 résidents et employés vaccinés ont contracté la maladie. Le CIUSSS de la Capitale-Nationale rappelle que la réponse immunitaire n'est pas instantanée, après une première dose. La première dose du vaccin de Pfizer-BioNTech contre la COVID-19 a été administrée dans ce milieu de soins le 14 décembre dernier. Trois jours plus tôt, en pleine préparation de la campagne de vaccination, le CIUSSS de la Capitale-Nationale révélait que deux cas avaient été détectés. La vaccination s'est déroulée comme prévu, mais n'a pas empêché la propagation du virus. Selon les dernières données de la santé publique, plus de 100 travailleurs et résidents ont obtenu un résultat positif. De ce nombre, au moins 66 résidents et 20 employés vaccinés ont contracté la maladie. Certains pourraient avoir été contaminés avant de recevoir leur dose. Le CHSLD accueille 230 résidents. Parmi ceux-ci, ils sont 202 à avoir choisi d'obtenir le vaccin, ainsi que 125 employés. Deux doses La situation ne surprend pas le CIUSSS de la Capitale-Nationale. Nous nous attendions à ce qu'il puisse y avoir des cas chez les travailleurs et les résidents vaccinés, entre autres, puisque ceux-ci n’ont reçu qu'une seule dose du vaccin, a fait savoir par courriel la porte-parole Mélanie Otis. Pour que le vaccin de Pfizer-BioNTech atteigne 95 % d'efficacité, une deuxième dose doit être administrée 21 jours après la première. La réponse immunitaire n'est donc pas instantanée ni complète après la vaccination, a précisé Jacques Girard, adjoint médical au directeur de santé publique, lors d'une entrevue à Première heure. Le virus s'est propagé dans la résidence avant que le vaccin puisse faire effet. Le temps que la vaccination nous permette d’avoir les bénéfices, en termes de protection, bien évidemment, il y a un délai d’à peu près deux semaines, 14 jours, pour la montée des anticorps, a-t-il expliqué. Ainsi, les résidents et employés devraient être immunisés depuis cette semaine, ce qui laisse présager une diminution des nouveaux cas. Les deuxièmes doses, quant à elles, seront administrées dans la semaine du 4 janvier au CHSLD Saint-Antoine. Un milieu sans cas Lorsque le CHSLD a été choisi comme lieu de vaccination, l'établissement ne comptait aucun cas, comme convenu avec la société pharmaceutique. Mais au moment de mettre en place, on a eu des cas, mais des cas relativement limités à une unité, donc on a convenu avec la compagnie qu’on allait tout de même procéder, a soutenu Jacques Girard. Deux jours avant que la première dose de vaccin soit administrée, 15 cas ont été recensés. L'éclosion a ensuite pris de l'ampleur. Ce sont des cas qui sont survenus après qu’on ait commencé finalement à vacciner. Mais c’était attendu dans la mesure où on pensait colmater cette brèche-là, a ajouté M. Girard. La porte-parole du CIUSSS de la Capitale-Nationale souligne d'ailleurs que les essais cliniques des compagnies pharmaceutiques se sont déroulés dans un environnement normal, et non pas dans un milieu où il y avait une éclosion. Une stratégie différente? Pour respecter son entente avec la société pharmaceutique, le gouvernement doit conserver en stock des doses de vaccin pour offrir la deuxième. Une affirmation qui a ensuite été corrigée, mercredi. L'adjoint médical Jacques Girard mentionne que des analyses sont en cours avec l'Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) pour s'assurer que la stratégie est adéquate. Est-ce qu’on pourrait, par exemple, vacciner le plus de personnes possible et faire en sorte que les doses qu'on a réservées pour la deuxième dose, qu’on puisse les donner, ces doses-là, au moment où on est approvisionné? Vous voyez, c’est toute une série de considérations complexes, a-t-il soulevé. Cette éclosion rappelle que, même si un vaccin est offert, il faut continuer de se protéger après avoir été vacciné. Et même si le fait d’être vacciné conférait une réelle protection, après une dose, et suite à la seconde dose, ce dont nous ne doutons pas, nous savons que le virus pourrait tout de même transiter chez certaines personnes, puisque le vaccin n’est pas efficace à 100 %, a rappelé la porte-parole du CIUSSS de la Capitale-Nationale, Mélanie Otis. Avec les informations d'Alexandre Duval et de Kassandra Nadeau-Lamarche |
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Mon Victo (site web) - 2020/12/30 |
Hugues Laroche La situation semble vouloir s’améliorer dans les résidences privées pour aînés touchées par des éclosions de COVID-19 dans Arthabaska – Érable. Selon les données du CIUSSS MCQ présentées mardi, les éclosions seraient terminées à l’Hôtel-Dieu d’Arthabaska et aux Jardins du parc linéaire à Victoriaville. Ailleurs, une cinquantaine de cas serait toujours actifs à la résidence Villa St-Georges et une vingtaine chez Sélection Retraite, deux établissements de Victoriaville. À cette dernière place, un employé et un résident ont reçu un résultat positif, portant le total à 32 personnes infectées. Au Pavillon Marchand de Victoriaville, un travailleur et trois résidents ont aussi été testés positifs, pour un cumulatif de 17 personnes atteintes. Dans les autres résidences privées touchées, on ne rapporte aucune nouvelle infection. |
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Radio-Canada (site web) - 2020/12/30 |
La Presse canadienne Québec veut encourager les étudiantes au DEC-BAC en sciences infirmières à suspendre une partie de leur cheminement universitaire pour mettre immédiatement la main à la pâte dans le réseau de la santé. Le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, a confirmé sur Twitter mercredi qu'il travaillait sur un tel programme en collaboration avec sa prédécesseure, Danielle McCann, maintenant ministre de l'Enseignement supérieur. L'annonce doit être officialisée au début du mois de janvier, a mentionné l'attachée de presse du ministre, Marjaurie Côté-Boileau. Selon un document obtenu par La Presse canadienne, le gouvernement proposera aux étudiantes de ralentir volontairement leurs études et de suspendre leurs stages pour la session d'hiver 2021, sur une base volontaire, afin de prêter main-forte au réseau de la santé. Jusqu'à 2000 étudiantes pourraient se prévaloir de cette mesure, sur les 5000 qui sont actuellement inscrites au programme DEC-BAC en sciences infirmières dans les universités du Québec, précise le document. Les volontaires recevraient une bourse afin de pallier au retard de diplomation ainsi qu'aux frais d'inscription à une session complète. La bourse serait de 5000 $ ou de 10 000 $, selon que l'étudiante était inscrite au programme d'études à temps partiel ou à temps plein. Le gouvernement prévoit que cette mesure pourrait coûter 28 millions au total, d'après le document. Que ce soit une dizaine ou une centaine d'infirmières qui se joindront plus rapidement sur le terrain, tous les effectifs sont les bienvenus. Marjaurie Côté-Boileau, attachée de presse du ministre de la Santé Évidemment, la réussite des étudiantes demeure la priorité et nous allons tout mettre en oeuvre pour faciliter leur parcours lorsqu'elles le reprendront, a-t-elle ajouté. Certaines titulaires d'un diplôme d'études collégiales (DEC) en soins infirmiers choisissent de poursuivre leurs études au baccalauréat, mais elles peuvent obtenir le droit d'exercer la profession dès leur sortie du cégep. Cette nouvelle survient au moment où la pression monte au sein du réseau de la santé, qui a franchi le cap des 1200 personnes hospitalisées en raison de la COVID-19, dont 150 aux soins intensifs. Au plus fort de la crise, au printemps, on dénombrait plus de 1800 patients, dont 200 aux soins intensifs. Un réseau durement éprouvé La première vague d'infections a été marquée par les pénuries de personnel, qui ont forcé des mouvements de main-d'oeuvre d'une zone à une autre et entre différents établissements, ce qui a été reconnu comme une des causes de la propagation du virus dans les CHSLD, entre autres. Des arrêtés ministériels ont permis de limiter les vacances des professionnelles en soins, qui se disaient déjà surmenées par les heures supplémentaires obligatoires. Le recours à des agences privées de placement s'est fait à des coûts astronomiques et l'armée a dû être déployée en soutien. Des mesures exceptionnelles ont par ailleurs été adoptées pour former des milliers de préposés aux bénéficiaires à la vitesse grand V. |
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La Tribune (site web) - 2020/12/31 |
Marie-Christine Bouchard Un peu plus de 100 nouveaux cas confirmés de COVID-19 par jour: voilà la moyenne que maintient l’Estrie depuis environ un mois, et la semaine de Noël qui se termine n’a pas fait exception.Les nombreuses éclosions dans les CHSLD et les résidences privées pour aînés (RPA) continuent de faire des ravages. Pas moins de 19 aînés sont décédés à cause des complications de la COVID-19 au cours des sept derniers jours. La direction du CIUSSS de l’Estrie-CHUS a pris la décision de ne plus diffuser de bilan quotidien des éclosions en cours pendant la période des Fêtes. Il est donc impossible de connaître l’étendue des éclosions dans chacun des réseaux locaux de services (RLS) de la grande région sociosanitaire de l’Estrie. Toutefois, le ministère de la Santé et des Services sociaux continue de publier les listes des CHSLD et des résidences privées pour aînés (RPA) en « situation critique » et en « situations sous haute surveillance ». On peut y constater que six résidences privées pour aînés (RPA) et un CHSLD de l’Estrie se trouvent maintenant sur la liste provinciale des CHSLD en situation critique. La RPA Place Sanborn d’Ayer’s Cliff, le Pavillon du parc de Granby, la Résidence Sérénité de Saint-Ludger (RLS du Granit), la Résidence Haut-Bois à Sherbrooke, la Maison familiale de Coaticook, la Résidence Duhamel de Notre-Dame-de-Stanbridge (RLS de la Haute-Yamaska) ainsi que le CHSLD Centre Marie-Berthe Couture de Granby comptent en ce moment plus de 40 % des résidents qui sont toujours atteints de la COVID-19. Prenons l’exemple de la Résidence Haut-Bois, qui lutte depuis un mois contre une éclosion de COVID-19. Jusqu’ici, 47 usagers et 18 employés ont été infectés, alors que six résidents sont décédés des complications liées à l’infection. Une situation difficile pour l’ensemble des résidents et du personnel, explique Léa-Maude Roy, responsable des communications à la Résidence Haut-Bois.« Je ne peux pas dire que ça va bien encore à la résidence. Lors du dernier dépistage, il y avait encore des gens positifs. Nous avons bien hâte de connaître les prochains résultats », ajoute Mme Roy.« Je dirais que le moral est quand même bon, malgré les circonstances. Les résidents qui sont infectés et qui sont toujours ici vont plutôt bien. Quant aux employés, comme on reçoit de l’aide de l’extérieur, ils ont plus de temps pour s’occuper des résidents et ça les encourage », ajoute-t-elle. La Résidence Brooks de Sherbrooke et la Résidence Saint-Antoine de Granby (nouvelle éclosion de mercredi) suivent sur la liste des RPA en « situation sous haute surveillance » avec 15 à 30 % de leurs résidents encore infectés par la COVID-19. La situation s’est enfin stabilisée au CHSLD Villa-Bonheur de Granby. Il n’y reste plus que trois aînés qui ne sont pas encore rétablis de la COVID-19. Quand l’éclosion sera terminée, il y aura toutefois un très grand vide à l’intérieur de ce CHSLD d’une centaine de places: près du tiers des résidents sont décédés à l’intérieur de quelques semaines seulement. Une autre semaine en montagnes russes Le bilan estrien de la COVID-19 est reparti à la hausse mercredi avec 123 nouveaux cas confirmés. Tout un contraste avec les données de lundi et mardi, où il y avait eu 73 nouveaux cas chaque journée ainsi que 99 cas dimanche, mais en parfaite cohérence avec les 122 et 123 nouveaux cas de vendredi et samedi dernier.Sur ce graphique, on peut apercevoir la courbe de la pandémie de COVID-19 du RLS de Sherbrooke et du RLS de la Haute-Yamaska, les deux RLS les plus populeux de la région de l’Estrie. Au prorata de leurs populations respectives, c’est dans les RLS de Coaticook, de la Haute-Yamaska, de Sherbrooke puis du Val-Saint-François que l’on retrouvait mercredi le plus grand nombre de personnes toujours infectées par la COVID-19. Depuis le début de la pandémie en Estrie, 7733 personnes ont été infectées par la COVID-19, 166 personnes sont décédées et 6549 personnes sont rétablies. Il reste donc en ce moment 1018 cas actifs en Estrie. |
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